lundi 4 avril 2011

Un nouveau travail : “Le Chevalier aux abats”

… donné en spectacle le 19 mai 2011 aux Festival Les Chimères de Bernicourt (lu par Olivier Brabant & Cie).

 

Pas un conte de fées, « Le Chevalier aux abats »… D’abord un conte anonyme (le « Lai d’Ignauré »), du début du XIIIe siècle, parmi d’autres qui déclinent la figure du cœur mangé, et dont on trouve encore une version sous la plume de Boccace à la moitié du XIVe siècle, dans son « Decameron ». Féroce comme on peut s’en douter, d’une férocité cannibalique, et éros, comme sentiment et appétence amoureux. L’évocation d’un grand amant – le chevalier a le cœur galant –, trop prodigue, dans une société féodale où l’amour courtois se découvre discourtois… Le chevalier a fait cocus tous les seigneurs du château, il y laisse plus que des plumes. Féros.

 

Prologue

 

Un chevalier
un Moyen âge
des dames
des maris
un amant.

Onze épouses
ont un mari
ont un amant
onze maris, un amant
le même amant
toutes
et ne le savent pas.
Pas encore.

Chevalier très satisfait en cette conjoncture :
un jour elle
un jour celle
celle-ci, celle-là
lendemain une autre
etc.

Un beau jour, jour de fête, elles
– verger, pommiers, allégresse –
se confient chacune d’elles
se fraye chemin dans le seigle
onze dames découvrent
pot aux roses, déconfites
se découvrent le même
toutes maîtresses
du m’aime…
Ce jour-là, elles tirent à la courte paille
la seule qui – une seule désormais
pour le chevalier
à prendre ou à laisser.

Las, plus jamais
un jour elle
un jour celle
celle-ci, celle-là
lendemain
demain surlendemain
belles amours adieu.
Tirée à la courte paille

une seule désormais
pour le chevalier c’est
à prendre ou à laisser.

Il lui faut bien accepter
quand la dame désignée par le sort
n’est pas la moins appréciée…

Bel amour
partagé, profond, véritable
au service de la dame, de ses désirs
chevalier à l’affût
maintenant fidèle à jamais !

Beaucoup étreint
n’embrasse plus.

Chevalier oh ardent
d’autant plus
qu’il est au service
d’une seule…

Las
à trop étreindre…

Serviteur
un qui veille au grain
s’en trouve toujours un
zélé aux intérêts
du seigneur, à lui rapporter
sans rien celer, surtout
tout révéler, sans rien omettre
toutes onze, et tirage au sort
qui le fait plus trompé que les autres.
Alors l’époux
les autres époux
onze époux s’émeuvent en chœu-
r
ah l’ignoble
touche à toutes, cœu-
r vil
l’impudent traître !

Qui trop étreint…

Alors
époux, autres époux
le convient à la chasse
dont le gibier est
dont il est le

gibier.

Il était une fois amour, dents, onze
maris à la chasse
à la chasse aux bas morceaux
gibier, dames
bouche en cœu-
r

 

(…./…)

2011-05-26_001857